Entre deux hivers, le bonheur…

La plupart des patients que je reçois vont mal : normal sinon ils ne feraient pas appel à un thérapeute. Et au fil des semaines, leur état s’améliore petit à petit.

Puis un jour, ils se sentent à nouveau mal et sont tout étonnés.

Cela vous est sans doute arrivé : pendant toute une période, la vie tourne harmonieusement et tout à coup, le moral dégringole.

C’est un des principes de la vie que nous oublions souvent :

Il y a un jour et il y a une nuit… Une lune montante et une lune descendante, un soleil qui se lève et un soleil qui se couche.

La vie est faite d’opposés, ils alternent et se succèdent : c’est le cycle de la vie.

Nous ne pouvons profiter de la chaleur que parce que nous connaissons le froid et entre les deux, toute la gamme des températures.

Nous ne pouvons sentir que nous allons bien que parce que nous avons été mal et entre les deux, toute la symphonie des états émotionnels.

Or nous voudrions que les états positifs que nous vivons durent éternellement.

Lorsque nous entreprenons un travail thérapeutique, nous espérons nous sortir définitivement du marasme dans lequel nous sommes. Cela ne fonctionne pas ainsi.

De plus nous ne mesurons pas l’amélioration que nous vivons objectivement : si ça va mal, ça va mal.

Imaginez qu’après un évènement qui vous a bouleversé, vous alliez mal.

Nous allons évaluer votre mal-être sur une échelle de 0 à 10 : 0 je vais très très mal « C’est la pire souffrance que j’aie jamais vécue », 10, je vais très très bien. « C’est l’état idéal dans lequel je voudrais être chaque jour ».

De jour en jour, votre situation va s’améliorer. Disons que vous êtes à 6 sur 10. Vous comparez au 10 sur 10 que vous voudriez atteindre.

Déjà là, une remarque s’impose : dans votre représentation des choses, vous avez peut-être choisi un 10 sur 10 que vous n’aviez jamais atteint mais seulement imaginé. Au fur et à mesure que vous avancez, il s’éloigne car c’est une illusion.

Ramenez votre 10 sur 10 de bien-être à un état que vous avez déjà vécu.

Bref, vous êtes à 6 sur 10 et un matin, vous vous levez après un mauvais rêve (dont vous ne vous souvenez peut-être même plus) et vous êtes retombé à 3. Le 6 sur 10 que vous viviez depuis quelque temps était devenu votre norme, votre 10 sur 10 temporaire.

En redescendant à 3, vous avez tout à coup la sensation d’être retombé à zéro !

Est-ce que vous me suivez ? 

Mais vous êtes toujours à 3 alors qu’au début du processus, vous étiez à ZERO.

La vie est cycle, votre santé psychique n’y fait pas exception et vous ne pouvez comparer « aller mal » que si vous avez « été bien ».

Au fur et à mesure de votre processus de guérison ou d’amélioration, vous descendrez moins bas. La vie vous offrira aussi de nouveaux 10 sur 10 à atteindre.

Et à nouveau, vous pourrez dégringoler de quelques points et ensuite les retrouver.

Je constate cela tous les jours dans l’accompagnement des personnes en deuil : juste après le décès, elles me disent que c’est la pire période de leur vie, que jamais elles n’ont vécu une telle souffrance et c’est bien sûr une évidence.

Mais quelques mois après, lorsqu’elles entrent dans la période de dépression du deuil, elles me disent exactement la même chose alors qu’elles ont été temporairement mieux.

Si je leur rappelle l’état qu’elles me décrivaient au début du deuil, elles peuvent constater que leur souffrance a évolué. Mais la sensation qu’elles en ont est identique en vertu du processus que je vous ai expliqué ci-dessus.

Tout est cycle, tous les hivers ressemblent aux hivers mais entre deux, il y a eu le printemps, l’été et puis l’automne. Mais quand l’hiver revient nous retrouvons les mêmes sensations pourtant, ce n’est jamais la même année !

Et le bonheur là-dedans ?

Imprégnez-vous de ces cycles de la vie comme d’un état naturel. Laissez-vous porter par ce ressac continu qui vous berce. Parfois vous êtes en pleine mer, dans la tempête, le lendemain, une vague vous a ramené sur la plage.

Dans l’instant présent, si vous arrêtez le flot de vos pensées et vous concentrez uniquement sur ici et maintenant, vous vous approcherez plus souvent des 10 que des 0.

A condition de laisser votre mental de côté et de vous installer dans le calme de votre respiration :

Inspirez, expirez, lentement, c’est le cycle de votre corps, de votre vie.

Crédits photographiques : Marie-Noël Damas - chrisroll2 – freedigitalphotos.com

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